jeudi 20 septembre 2007

Extrait de correspondance: privatisation, IÉM et Hydro

NOTE

Le 30 août dernier, Maisonneuve en direct donnait la parole à des partisans de la privatisation d'Hydro Québec, dont un certain Garcia relié à l'Institut économique de Montréal.
Il a bien fallu réagir.
Voici, pour mémoire, ce que j'écrivais à l'équipe de l'émission.


Certes, comme le disait Maisonneuve, des hurluberlus comme Garcia et les bouffons de l’IÉM ont bien le droit de dire ce qu’ils veulent.

Toutefois, les médias (et surtout la radio publique) ne sont absolument pas obligés de prendre ces gens-là au sérieux, ni de leur offrir gracieusement une tribune qui jouit (encore) d’un certain prestige. Ils ont même, me semble-t-il, le devoir de ne pas le faire… tout au plus devrait-on reléguer ces énergumènes-là, comme les Doc Mailloux (lui aussi bardé de diplômes), aux émissions comme Tout le monde en parle où tout le monde sait que tous ceux qui apparaissent sur le plateau sont des amuseurs publics qui essaient de nous vendre quelque chose (un livre, un film, une idée, une « image » et le reste et le reste) dont nous n’avons peut-être pas besoin.

Sur le fond de la chose : on sait ce que ça donne, le privé dans le domaine de l’énergie. Ça donne des choses édifiantes comme le scandale Enron. Ça donne des tarifs exorbitants comme à New York. Ça donne ce que ça donnait au (pas trop) bon vieux temps de la Shawinigan Water and Power, de l’Abitibi Power et de tout ce beau monde-là. Et on voit déjà le beau bordel que le secteur privé d’Hydro, l’éolien, est en train de créer.

Hydro, c’est de l’infrastructure (entre autres, des barrages). Et on sait comment le privé prend soin des infrastructures à caractère public : demandez-le au bon maire Tremblay.

Oui, il y a de graves problèmes chez Hydro, surtout (mais pas seulement) à cause de ce que la « gang du Gaz » (comme certains, « à l’interne », appellent encore Caillé, Vandal et consorts) a fait… mais on n’a surtout pas besoin du privé pour régler cela. On a juste besoin d’un bon gouvernement déterminé à remettre la nomenklatura hydro-québécoise à sa place en lui rappelant que si, il y a longtemps, les Québécois se sont mobilisés sous la bannière « Maîtres chez nous ! », personne n’a jamais voté pour qu’Hydro soit maître au Québec.

Au fond, la vraie raison pour laquelle Garcia et les autres veulent revenir sur la nationalisation de l’électricité est probablement celle-ci : pour ces bien-pensants (ces « gens de bien et de biens », comme aurait dit Guillemin), il faut que la génération d’aujourd’hui sache que, lorsque les « électeurs-électrices-électricité » des années soixante ont voté massivement pour la mesure « socialiste » de nationalisation de l’électricité, ils ont fait une grave erreur. Pis encore, ils ont perpétré un crime de lèse-secteur-privé.

Il y a toutefois une différence entre la garde descendante représentée par Garcia et la garde montante regroupée autour de l’IÉM. Les gens comme Garcia ne craignent ni le passé, ni l’avenir : ils ont largement profité du premier, et leur retraite est assurée pour ce qui est du second. Ils n’ont rien à perdre. Mais les arrivistes de l’IÉM et leurs semblables, eux, veulent assurer leur avenir : il ne faudrait surtout pas que la nouvelle génération ait, si on lui en donnait la chance, l’idée de voter pour une nouvelle « équipe du tonnerre » qui n’hésiterait pas à « aller aux urnes » pour clouer le bec aux intérêts privés.

Évidemment, il n’y a aucun danger que l’occasion se présente bientôt.

Je gagerais que chez ces gens-là on pense « grand » : en faisant disparaître Hydro-Québec (et en oblitérant, si possible, sa raison sociale même), on s’assurerait que les « nouveaux arrivants » n’aient pas à apprendre qu’il était une fois… une majorité de gens qui habitaient le territoire de ce qui était alors la « Belle province » qui osèrent défier (bien timidement, mais quand même) ceux qui prônaient l’évangile du tout-au-privé. Et que, parmi ces gens-là, il y avait des travailleurs de la Shawinigan Water and Power et des autres merveilleuses entreprises privées. On parle ici de chauffeurs de camion, de monteurs de lignes, d’employés de bureau et bien d’autres : du « petit monde », du « monde ordinaire », des gens qui auraient été conspués par les prof Bouchard de l’époque. Ils (et elles) n’ont pas hésité à mettre leurs emplois en jeu en militant en faveur de la nationalisation. Le plus souvent, leurs familles les ont soutenus ; dans certains cas, et des familles ont été déchirées par le débat.

Dans bien des cas, ces hommes et ces femmes ont été beaucoup plus courageux que les soldats qui vont se faire envoyer en l’air (dans tous les sens du terme, me dit-on) à Kandahar et ailleurs. Mais ça, c’est une autre histoire.

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