vendredi 18 novembre 2011

LE MONDE MUNICIPAL: POLITIQUE OU APOLITIQUE?

CORRESPONDANCE ADRESSÉE À MADAME ISABELLE PORTER DU DEVOIR

J'ai lu votre article de ce matin (http://www.ledevoir.com/politique/villes-et-regions/336374/le-monde-municipal-est-il-apolitique). J'ai aussi entendu l'une des auteures de l'ouvrage cité à la radio ce midi. En attendant de lire le pensum de mesdames Bherer et Breux, quelques notes:

1. Depuis des lustres, les élections municipales ont été une affaire de personnalités (on connaît nos icônes: Houde, Drapeau, Doré, Bourque... et aussi Sarto Fournier, Croteau « l'homme en blanc», la mairesse Boucher et sa robe Saint-Laurent, le maire Labeaume et sa moumoute, et tout et tout).

2. Le "réformisme" existe ici depuis longtemps: souvenons-nous de la "Ligue d'action civique" de Drapeau... et de ce que ça a donné.

3. Il me semble aussi que mesdames B&B ne savent pas faire la distinction entre les organisations politiques qui visent à former des gouvernements (à Ottawa et dans les provinces) et celles qui visent à s'installer au contrôle d'administrations locales (comme Québec ou Montréal, qui ne sont, comme aurait pu dire Séraphin Poudrier à son meilleur, que des "créatures" du gouvernement).

4. Les propos de Mme Bherer indiquent clairement qu'elle ne comprend pas grand chose à l'extrême "politisation partisane" (au sens "démocrate-vs-républicain") de la politique municipale aux États-Unis.

5. On pourra revenir sur la chose, mais le RCM (en tout cas, celui qui a porté "Golden John Doré" à la mairie n'était pas un parti "à caractère fortement idéologique", mais plutôt une coalition qui se voyait comme un "parti frère" du PQ (ou à tout le moins du PQ "tendance Gérald Godin"). dans une large mesure, il en a été de même, au niveau scolaire, pour le MÉMO.

6. Un peu de recherche démontrerait probablement que l'apparente "personnalisation" de la politique municipale n'est qu'une façade derrière laquelle on retrouve les mêmes vieux acteurs: ainsi à Montréal, les "bons vieux rouges", les "bons vieux bleus" et les "séparatistes raisonnables" ont formé des coalitions parfaitement interchangeables, chacune capable de ne pas gêner les gouvernements de Québec et d'Ottawa.

7. Un fait demeure. Le maire de Montréal est élu "dans la boîte" par plus d'électeurs que le chef du parti qui forme le gouvernement à Québec ou à Ottawa. Ce maire a pu, par le passé (on pense à Houde, Drapeau, Doré... et même à Bourque!) user de ce "mandat du peuple" pour forcer la main de Québec et même d'Ottawa. Mais aujourd'hui, les interventions plus ou moins concertées des officines politiques (tous partis confondus) de Québec et d'Ottawa font en sorte qu'il est impossible que, pour l'avenir prévisible (à moins d'un alignement des astres fort peu probable), le maire de Montréal ait un poids significatif dans le grand jeu de la balance des pouvoirs.

MONTRÉAL : L’AFFAIRE EST KETCHUP, LES BRETELLES CLAQUENT !

Un claquement de bretelles retentissant

Beau pétage de bretelles du bon maire Tremblay ici :

http://www.youtube.com/watch?v=rbd32XyVMy0&feature=player_embedded

Et moi qui pensais que la priorité, c’était la « ceinture verte » de Montréal… ben non, nono, la priorité c’est les bretelles et comment on peut se les péter !

Ça prend au moins des bretelles de police (comme celles des ci-devant Delorme et Duchesneau) pour se les péter autant. Si vous voulez vous procurer des bretelles adéquates, voir ici :

http://www.policesupplies.ca/produits_divers.htm.

L’affaire est ketchup : le rouge imaginaire

En fait, Tremblay et les autres vedettes de l’info-pub d’Oignon Montréal (ou est-ce « Oh ! Non ! Montréal ?) nous livrent un merveilleux message, assaisonné de cet accompagnement essentiel du « comfort food de chez nous » : le ketchup.

Ils ne devraient pas se gêner pour faire un peu de « placement de produit », par exemple :

· À Montréal, l’affaire est ketchup ! Tellement que Heinz (« 57 variétés de diversité ») ne fournit plus à la demande !

· À Montréal, l’affaire est ketchup ! Tellement qu’on croirait traverser la Mer rouge en traversant Sainte-Catherine ! Imaginez ci c’était du Red Bull comme à Québec !

Le rouge réel (le « gros rouge qui tache ») :

Tout cela est bel et bon, comme la vie décrite par Yvon Deschamps (« Ah que la vie est belle quand on n’y pense pas trop. »). Mais quand on y pense un peu (même « pas trop »), on sait que ce qui coule pour vrai à Montréal, c’est pas du ketchup « Le ketchup, c’est du fake », aurait dit Mad Dog).

Le vrai rouge qui coule à Montréal, c’est d’abord « l’encre rouge » au sens « comptable » de la chose :

  • L’encre rouge qui colore le bilan du Bixi.
  • L’encre rouge que tentent tant bien que mal d’éponger plusieurs « institutions culturelles ».
  • L’encre rouge qui force la vente de la caserne Letourneux.
  • L’encre rouge qui justifie les compressions budgétaires des arrondissements (fermeture de bibliothèques, réduction de services divers et ainsi de suite).
  • L’encre rouge qui force à chaque jour les commerces de proximité indépendants à fermer.
  • L’encre rouge des finances des ménages qui les forcent à s’exiler vers les banlieues.

Le vrai rouge, c’est aussi du vrai bon rouge sang. Deux images, pour faire court :

  • Le terrible rouge du sang des victimes de la police de Gérald Tremblay.
  • Le terrible sang des personnes tuées dans les guerres plus ou moins ouvertes que se mènent les mafias montréalaises et qui sont tolérées, provoquées ou encouragées par « nos » forces policières.

Disons la chose comme elle est

Tout cela est non seulement triste, mais parfaitement odieux. Plus odieux encore, c’est que personne ne dénonce cette terrible et évidente réalité d’une voix forte. Quand je parle de « voix forte », je pense évidemment à Cicéron, au vieil Hugo « tonnant de son exil », ou à I.F. Stone ou Gore Vidal dénonçant les exactions et vilenies de la république impériale washingtonienne.

Mais nous parlons ici des « affaires municipales » et de la corruption toute québécoise que nous ne connaissons que trop. Plaçant donc la barre moins haut. Je pense tout simplement à des voix comme celles de Pax Plante, de Gérard Fillion et de leurs semblables. Je ne peux m’empêcher de faire la comparaison avec le temps présent. Et c’est en vain que j’essaie de trouver dans ce qui grouille, grenouille et scribouille dans le temps présent où je suis forcé de vivre, ne fût-ce que l’ombre de Pax, de Gérard ou de leurs semblables. Mais ça, comme écrivait Kipling, « c’est une autre histoire ».

Autre histoire, autre jungle

La phrase de Kipling « c’est une autre histoire » apparaissait, je crois, à la fin du Livre de la jungle.

Parlons donc de jungle. Ici, les artistes tentent de survivre dans ce qu’on décrit souvent comme un « paysage culturel ». Justement, ce n’est pas un « paysage naturel », mais un paysage culturel, un village de Potemkine, un pays de Cocagne, une façade derrière laquelle pour peu qu’on sache manier la machette (ou même le très élémentaire rasoir d’Occam) on découvre une bien vilaine jungle d’intérêts privés.

Ces intérêts ne sont pas seulement « en des mains privées ». Ils ne sont pas simplement privés : ils sont essentiellement (on pourrait dire congénitalement), privés de toute espèce de sens, au sens fort du terme. La seule espèce de sens qu’ils connaissent, c’est le sens des « espèces sonnantes et trébuchantes ». Et ce sens n’en est pas un. On disait jadis que derrière chaque grand homme, il y avait une grande femme. Je n’en sais rien. Ce que je sais, c’est qu’aujourd'hui, derrière chaque grand promoteur culturel, il y a un grand promoteur immobilier.

Dans la jungle de Mowgli, les loups étaient des loups qui hurlaient avec les loups, mais qui avaient de l’amour pour le petit homme. Dans la jungle néo-Hobbesienne des entrepreneurs culturels (il serait peut-être plus juste de parler d’un Jurassic Park hanté par des dinosaures paléo-capitalistes… faudra revenir là-dessus), l’artiste est un loup pour l’artiste. Pas surprenant qu’à force de se plier aux exigences de la « chasse au talent », tant d’artistes finissent… en carpettes !

De la chasse et de l’élevage : talent faisandé et faisan talentueux

Je pensais aussi, parlant de chasse au talent, au reportage sur l’élevage des faisans vu à L’Épicerie du 16 novembre… on pourrait facilement changer le discours de l’éleveur pour lui faire dire : « Ça prend 20 ans pour former un artiste prêt pour le marché ».

Facile de faire le parallèle. Monsieur Paul Desmarais invite ses ti-namis à la chasse aux faisans. Madame Jackie Desmarais invite ses tites-namies à la chasse aux talents.

Chacun son métier et les chasses seront bien gardées. Qui plus est, les rabatteurs (de faisans ou de talents) sont si habiles que les proies ne voient rien venir. Le temps de sortir de la ferme d’élevage (de faisans ou d’artistes), les proies, éblouies (par le soleil ou les feux de la rampe) sont déjà « dans le sac », alors même qu’elles croient sincèrement être libres des contraintes de la ferme et pouvoir enfin « voler de leur propres ailes ».

Dans le monde des Desmarais (et, par extension, dans celui de Gérald Tremblay, d’Alain Simard et tutti quanti), qui va en chasse ne perd jamais sa place, ou en tout cas, jamais pour longtemps. « Demandez-le à Carbonneau ! »… non : je veux dire « demandez-le à Labrecque ou à Lavallée !

vendredi 4 novembre 2011

MONSIEUR DANIEL LAMARRE RÉINVENTE LA GÉNÉTIQUE

Dans son texte publié dans La Presse du 2 novembre (« La créativité, notre atout : Montréal doit se donner un positionnement international fort »), M. Daniel Lamarre affirme que Montréal « possède un atout inestimable, inscrit dans son ADN : la créativité »

J’aimerais tout simplement que ce monsieur réponde à quelques questions.

  1. Si monsieur Lamarre utilise le vocable « Montréal » au sens propre (ville, région, etc.) :
    1. Sur quelles études scientifiques est fondée l’affirmation qu’une entité comme « Montréal » a un ADN ?
    2. Quels sont les protocoles cliniques pour déceler la présence ou la prévalence de la créativité dans l’ADN d’une entité (disons, Montréal) quand on la compare à une autre entité (disons, Toronto, Boston New York ou La Tuque) ?
  2. Si, par contre, monsieur Lamarre utilise le vocable « Montréal » au sens figuré (disons, « les habitants de Montréal ») :
    1. Comment a-t-on identifié le gêne de la créativité chez les individus de l’espèce homo sapiens ?
    2. Quelle est la répartition de ce gêne parmi les quelques milliards de spécimens d‘homo sapiens qui parsèment actuellement notre planète ?
    3. Comment a-t-on « testé » les habitants de Montréal pour la présence chez eux (et chez elles) d’un taux d’« ADN créatif » supérieur à, disons celui des habitants de Seattle, de Beijing ou de l’inévitable Saint-Élie-de-Caxton ?

Je soumets très humblement que la pierre angulaire de l’argumentaire du texte de monsieur Lamarre repose sur le postulat de l’existence de cet ADN à Montréal , et de l’« atout inestimable » qu’il constituerait pour ce même Montréal.

Monsieur Lamarre se doit de démontrer (science –fût-elle « simple science sociale »– à l’appui) l’existence de cet ADN et de ce qui en fait un « atout inestimable ».

Sinon, la réponse à la question posée par monsieur Lamarre à la fin de son texte (« Pourquoi ne pas se donner comme objectif de devenir la capitale mondiale de la créativité ? ») sera par trop évidente.